saka

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dimanche 22 décembre 2013

les "grands lecteurs", une espèce en voie de disparition ?

Hélas, hélas, je le crains (et le déplore). Il est vrai que lorsqu'on "avoue" lire deux livres (ou trois) par semaine, on voit, dans le regard parfois effaré et souvent incrédule de son -ou ses - interlocuteur(s) que l'on est "étrange" ou bien "à part" pour ne pas dire "doux dingue" (ou carrément dingue). On est soupçonné d'être un intellectuel, espèce radicalement inquiétante, éventuellement tarée : quelqu'un qui passe tout ce temps à se repaître de l'imagination des autres a quelque chose qui ne tourne pas rond aux yeux d'autrui. "Et comment faîtes-vous pour vous tenir au courant de l'actualité ?" -ce qui veut dire la réalité du monde contemporain-  "Eh bien, je me tiens AUSSI au courant... Mais ça ne prend pas tellement de temps que ça, parce que, dans ce qu'il est convenu de nommer "actualité" il y a beaucoup d'anecdotique, de factuel  (ne parlons surtout pas de "people" extrêmement attractif parce que d'une totale frivolité et de ce fait si appétent...) et peu de profondeur, d'effort d'analyse d'une situation donnée à un instant "t" avec une mise en perspective du contexte, de l'avant, de l'éventuel après. Bref, la littérature semble à des lieues de tout cela, sauf que, un quotidien très sérieux "Le Quotidien du Médecin" a publié récemment les résultats d'une étude américaine sur la TdE (théorie de l'esprit) c'est à dire "la capacité d'inférer et se représenter les émotions d'autrui" dont la conclusion est que la lecture de textes littéraires est "une sorte d'expérience sociale(...) qui stimule l'activité de théorie de l'esprit, nous place dans une situation où nous devons réellement utiliser à son maximum notre capacité de comprendre les autres personnes." (article signé Isabelle Trocheris et dont le titre est "La littérature aide à la compréhension de l'autre").
Eh bien, après la lecture de cet article  , je me sens moins seule dans mon combat "inutile", et moins dinosaure, la conclusion de l'article en question étant une citation d'Emmanuelle Castano, professeur à NSSR et coauteur de l'article paru dans "Science" : "Nous étudions le roman littéraire comme une pratique culturelle parmi d'autres. Nous espérons qu'en général ce travail  va provoquer une réflexion sur ce que cela signifie de vivre dans une communauté qui soutient les lettres et les arts."
Lire des textes littéraires serait alors un acte militant ? Oui, oui, oui, mille fois oui !