saka

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vendredi 6 avril 2018

Adieu au poète, musicien, chanteur, Jacques Higelin

Tristesse depuis que j'ai appris sa mort en fin de matinée. Higelin n'est pas mort, non, non, non. Ce soir, ou plutôt cette nuit j'écoute "Amor Doloroso", et c'est vraiment doloroso, j'ai bu une coupe de champagne, à sa mémoire, et en souvenir de cette chanson extraordinaire "Champagne !", sur laquelle j'ai tant dansé, chanté ! J'ai un magnifique souvenir d'Higelin, venu nous soutenir à Toulon quand le Front National avait gagné la ville -avec un taux minable d'électeurs-, mais le mal était fait, le mal était là.
Il y avait eu une immense manifestation d'opposants à cette idéologie mortifère, puis une opposition critique permanente pendant les années de leur gouvernance lamentable, bref, ils se sont sabordés. Et tant mieux.
Ce jour-là, de cette manifestation,  à laquelle Jacques Higelin était venu apporter son soutien, sa solidarité, nous étions avenue de la République, en face de la mairie d'où nous narguait la femme du maire, une coupe de champagne à la main et je pleurais (au fait, il y avait un mec qui prenait des photos, dont je soupçonne que c'était pour le nouveau pouvoir, j'ai dû être sur un fichier d'opposants, forcément "gauchistes", selon le vocabulaire de cette obédience idéologique qui confond gauchisme et défense de la démocratie).
Je pleurais donc, et Jacques Higelin m'a prise dans ses bras, m'a consolée, avec une tendresse et une bienveillance incroyables, j'ai ressenti une chaleur et une humanité qui m'ont fait tellement de bien.
Il me semble que c'était pour Noël 2013, mon fils cadet, alors journaliste à LCI, m'avait acheté le dernier album d'Higelin, l'avait reçu dans la matinale et, le raccompagnant, lui avait raconté cette anecdote. Et, aussitôt, Jacques Higelin, sur une feuille de papier, a écrit cette dédicace :
"Pour Sylvette, salut fraternel, dans mes bras pour la seconde fois, l'amour vous protège "
Merveilleux message, d'un homme, non seulement d'un immense talent mais d'une grande humanité. 

jeudi 5 avril 2018

Complément à "Complément d'enquête" du 5 avril 2018...

Cela fait un moment que je bous d'impatience, d'énervement, de colère, bref de tout qualificatif désignant une victime d'injustice - moi, surnommée Don Quichotte au lycée pour ma propension à me révolter contre tout traitement que j'estimais injuste envers mes camarades, ce qui m'a valu nombre de convocations devant la directrice de l'établissement, mais passons...) Depuis la mort de Johnny Hallyday -dont je n'ai jamais été une fan-, je m'attendais à ce qu'il est en train de se passer, la querelle de l'héritage entre enfants d'un premier -et même d'un deuxième- lit et veuve éplorée mais déterminée à ne rien lâcher. J'ai connu ça, et cela reste une blessure à vif, et je peux donc affirmer que, non, la loi ne protège pas les enfants d'un premier lit, et que, oui, un père peut déshériter ses enfants -du moins, une partie de ceux-là, à savoir justement ceux du premier lit- sans que cela ne trouble aucunement la Justice même sollicitée, ne répondant à cette sollicitation que par une indifférence totale. J'ai écrit un texte dont le titre est "Lettre ouverte aux marâtres et à la Justice qui les protège" dans lequel je raconte cette douloureuse expérience. Il se trouve qu'au moment où je l'estimais assez abouti pour le proposer à un éditeur j'ai eu une mission beaucoup plus urgente à accomplir. Ensuite,j'ai pensé que, après la terrible épreuve que j'ai traversée, cette partie de ma vie n'avait plus beaucoup d'importance et , ô surprise, voilà que l'affaire Halliday réveille cette douleur non résolue et non reconnue par la fameuse Justice de mon pays, en laquelle, je l'avoue, je n'ai plus aucune confiance. Entendons-nous bien, ce n'est pas tant une affaire d'argent que de "reconnaissance": mon père a renié ses trois enfants légitimes, au profit des deux illégitimes -qu'il a reconnus- pour une, ou des raison(s)que je n'ai jamais comprises. En gros, il a jeté son épouse et dans la foulée, ses enfants, avec l'eau du bain. Quant à la maîtresse, manipulatrice hors pair, elle a été aidée par la démence sénile des dernières années de mon père. Le début de ce texte évoqué plus haut commence ainsi : "Tout l'argent a été pour toi, toujours, tout l'argent", qui sont les paroles même de mon père, lors de ma dernière visite auprès de lui, adressées à sa compagne. Ses dernières paroles sensées. Ensuite il est retombé dans le silence. Il est mort deux mois après. Il avait été un professeur d'université, à la Faculté de Médecine, titulaire de la chaire de carcinologie (avant que cela devienne l'oncologie, terme tellement moins effrayant) chef de service au C.H.U., expert mondial auprès de l'O.M.S. Bref, un "pauvre" homme. Ni ma soeur, ni moi, ni mes neveux (mon frère étant mort à 42 ans) n'avons eu aucun souvenir de lui, pas même un livre, un objet, rien. Nous avons été niés jusqu'au bout, légitimes certes, mais rejetés.

mercredi 10 janvier 2018

insomnie

Depuis combien de temps n'ai-je rien écrit sur ce blog ni nulle part ailleurs ? Ecriture interdite, écriture qui se refuse à moi, alors que je ne vis plus que dans la réalité terrible d'une absence, d'un manque que rien ne peut, ne pourra combler. Je vis par habitude, mécaniquement, avec la sensation que l'imaginaire est mort aussi. Je n'ai plus que la lecture. Bon, je ne vais pas me plaindre, c'est énorme d'avoir gardé au moins cela intact, ce goût, ce désir de lire, cette nécessité de partir dans l'imaginaire des autres puisque le mien ne m'est plus accessible. S'il existe encore. Et dans ce cas, il est bien caché.
Un livre, en ce moment, me touche énormément, je l'ai acheté en octobre 2017, commencé à le lire puis je me suis arrêtée parce que ce qu'il disait m'était insupportable, trop proche de moi, de mon existence intérieure, l'extérieure ressemblant plutôt à une non-existence. Ce n'est pas une fiction mais le journal "de deuil", bien que je déteste ce mot, de Jean-François Billeter : "Une autre Aurélia", publié par les éditions Allia. Ce n'est pas une fiction, mais le récit de la mort de sa femme chinoise, Wen et de ce qu'il vit, ressent, pendant les mois qui suivent sa disparition. Je l'ai repris récemment, et il me fait du bien parce que, d'une part, j'ai enfin l'impression que quelqu'un me comprend, a ressenti, ressent les mêmes choses que moi, et d'autre part m'indique, par petites touches, une voie possible vers autre chose, une acceptation peut-être : "Wen, sorte de basse continue, égale et douce. Quelle chance d'avoir eu cette compagne dans ma vie. J'ai été heureux avec elle, il faut que je le sois sans elle. Je lui dois cela." Ou bien encore : " Deuil, mot affreux. Affreuse aussi la loi du silence qu'observent les autres, qui me parlent de tout sauf d'elle. Craignent-ils de me causer de la peine ? Ou ont-ils peur, au fond d'eux-mêmes ?" Et cela, tellement vrai :  "Heureusement que je suis mortel : cette nostalgie ne durera pas toujours." C'est même, actuellement, la seule chose qui me rend l'espoir.
Ce livre parle pour moi, j'ai souvent eu envie, depuis deux ans, de dire tout cela, sans avoir réussi à en trouver le courage, encore une citation, en forme d'interrogation : "M'en sortirai-je par le récit ? Sera-ce le moyen de recréer un tout, après la perte ?"
Oui, la question est bien là, est-il possible de recréer un tout, quand on est amputé d'une partie de soi-même ?